Le démembrement de la clause bénéficiaire en assurance-vie
- guilhemdetrie
- 22 sept.
- 3 min de lecture
Le démembrement de la clause bénéficiaire est une technique patrimoniale qui permet d'optimiser la fiscalité de la transmission en assurance-vie tout en protégeant les proches identifiés.
Une clause bien rédigée combine protection du conjoint, anticipation pour les enfants (ou autres) et optimisation fiscale.

Cette technique n’est pas pertinente dans toutes les situations.
Elle nécessite :
Une analyse patrimoniale complète pour définir précisément le besoin de la personne concernée (protection, transmission, fiscalité, gestion des capitaux).
Une rédaction adaptée et juridiquement sécurisée avec l’appui d'un conseiller.
1. Qu’est-ce que le démembrement de la clause bénéficiaire ?
En droit civil, démembrer un droit consiste à séparer :
L’usufruit : droit d’utiliser le bien et d'en perçevoir les fruits (souvent par le conjoint survivant). Pour un bien consomptible tel que de l'argent, on parle alors de quasi-usufruit. II y a alors la possibilité de consommer le capital initial.
La nue-propriété : propriété différée, qui devient pleine propriété au décès de l’usufruitier.
2. Objectifs les plus courants
Protéger le conjoint : il dispose librement des fonds pendant sa vie.
Garantir la transmission : les enfants recevront ce qui reste, sans taxation au second décès.
Multiplier les abattements : chacun bénéficie d’un abattement de 152.500€ au prorata de ses droits.
Créer une créance de restitution
3. Le quasi-usufruit
En assurance-vie, l’usufruitier perçoit souvent les capitaux en pleine disponibilité : c’est le quasi-usufruit.
L’usufruitier peut dépenser ou investir librement ces capitaux.
Les nus-propriétaires disposent alors d’une créance de restitution exigible au décès de l’usufruitier.
Cette créance est inscrite au passif de la succession du survivant, ce qui réduit l’actif taxable transmis à d’autres héritiers.
Il est vivement recommandé de formaliser cette créance (acte notarié ou reconnaissance de dette) pour garantir sa prise en compte fiscale.
4. Fiscalité applicable
Versements avant 70 ans
Article 990 I du CGI :
Abattement de 152.500€ par bénéficiaire (proportionnel à la valeur des droits).
Puis taxation à 20 % jusqu’à 700 000 €, et 31,25 % au-delà.
Répartition de l’abattement
Valeur fiscale déterminée par l’article 669 du CGI.
Ciblons la tranche 71-80 ans :
Âge de l’usufruitier | Valeur usufruit | Valeur nue-propriété |
71 à 80 ans | 30 % | 70 % |
5. Exemple comparatif
Données :
Capital décès : 400.000€
Décès de l’assuré à 71 ans
Conjoint survivant : 75 ans (usufruit = 30 %, nue-propriété = 70 %)
2 enfants nus-propriétaires
Versements effectués avant 70 ans
Abattement successoral de 100.000€ par enfant déjà consommé (pour l'exemple)
5.1 Clause démembrée (conjoint en usufruit, enfants en nue-propriété)
Répartition fiscale :
Usufruitier : 400.000 × 30 % = 120.000€ → exonéré car conjoint (art. 796-0 bis CGI)
Nus-propriétaires : 400.000 × 70 % = 280.000€, soit 140.000€ chacun
Application de l’abattement assurance-vie :
Abattement par enfant : 152 500 × 70 % = 106.750€
Taxable par enfant : 140 000 – 106 750 = 33.250€
Impôt par enfant (20 %) : 6 650€
Bilan fiscal :
Impôt total enfants au premier décès : 13.300€
Aucun impôt au second décès : les enfants deviennent pleins propriétaires sans nouvelle taxation.
La part de l'abattement de l'assurance vie non consommé, peut être optimisée par une seconde assurance vie qui permettrait par exemple de donner 45.750€/enfant sans fiscalité.
Si le conjoint consomme le capital, les enfants bénéficient d’une créance de restitution à concurrence de la somme consommée, lors de la succession du survivant.
Le paiement des droits sera payé au premier décès. Il peut être fait déduction du capital de l'assurance vie transmise.
5.2 Clause non démembrée
Premier décès :
Capital 400.000€ versé intégralement au conjoint → exonéré (art. 796-0 bis CGI)
Second décès :
Capital supposé intact de 400.000€ transmis aux enfants via succession
Chaque enfant reçoit 200.000€
Abattement successoral de 100.000€ déjà consommé
Droits en ligne directe : environ 39 194 € par enfant
Bilan fiscal :
Impôt total enfants au second décès : environ 78.388€
Pas de créance de restitution possible si le conjoint consomme le capital.
5.3 Comparaison synthétique
Clause démembrée | Clause classique | |
Impôt au premier décès | 13 300 € | 0 € |
Impôt au second décès | 0 € | ~78 388 € |
Créance de restitution | Oui, si quasi-usufruit | Non |
Impôt total enfants | 13 300 € | ~78 388 € |
Gain fiscal | ~65 088 € | - |
Conclusion
Le démembrement de la clause bénéficiaire en assurance-vie est un outil sophistiqué qui protège un proche, optimise la transmission et permet de réduire significativement l’imposition des héritiers.
L’existence d’une créance de restitution en cas de quasi-usufruit consommé constitue un atout supplémentaire, pouvant alléger fortement la succession au second décès. Attention néanmoins, cela peut aussi être un risque. Cela doit bien correspondre aux objectifs sur premier défunt.
Dans le cas où les abattements successoraux sont déjà consommés, le gain fiscal devient encore plus conséquent, comme le montre la comparaison : plus de 65.000€ économisés pour les enfants.


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